blog d'une fille un peu tarte qui fait des tourtes

mercredi, août 08, 2007

Die Hauptschule



Pour faire suite à mon post de mardi dernier sur le thème de l'école en Allemagne, voici un article de Nathalie Versieux, paru dans Libértion mercredi dernier, et intutilé : "La voie sans issue du collège allemand".

"Il y a un an, un tremblement de terre secouait l’univers scolaire outre-Rhin. Une poignée d’enseignants lançaient par voie de presse un appel au secours, constatant leur incapacité de continuer à enseigner dans leur collège de Neukölln, un quartier défavorisé de Berlin.

Indiscipline, racisme entre minorités, violences, vandalisme…

«Nous formons ici de futurs criminels et terroristes», résumait alors une professeure.

L’école Rütli présentait tous les syndromes du dysfonctionnement d’une bonne partie des Hauptschule, ces établissements du secondaire réservés aux adolescents en échec scolaire.

«Dans 16 % des Hauptschule allemandes, il n’est plus du tout possible d’enseigner», rappelle une étude de l’Institut Max-Planck, en listant ces dysfonctionnements.

Aujourd’hui, le calme est revenu à l’école Rütli. «Nous avons de nouveau un directeur, davantage d’enseignants, de moyens, et même trois travailleurs sociaux issus de l’immigration», pour faciliter le dialogue entre familles et professeurs.

Près de 83 % des adolescents de l’école Rütli sont issus de l’immigration (contre 33 % au milieu des années 80). En un an, l’ambiance au sein de l’établissement s’est améliorée. Des initiatives ont été lancées pour développer des ateliers de musique, de boxe ou de danse. Un groupe d’élèves a même lancé Rütli-Wear, une collection de tee-shirts vendus à l’extérieur de l’établissement.

«Mais, pour les élèves, pour leurs chances d’avenir, rien n’a vraiment changé», déplore Petra Eggebrecht, professeure à l’école Rütli, «par conviction», depuis 1970.

«Les rares élèves qui parviennent à décrocher leur diplôme de fin d’études ne trouvent pas de place d’apprentissage. Il est temps d’abolir le système scolaire à trois vitesses», en vigueur dans la plupart des Länder allemands et qui fait des Hauptschule un «dépotoir» aux yeux des employeurs potentiels. Cette année, aucun des élèves de la 10e classe (qui préparent leur diplôme de fin d’études) n’a pour le moment trouvé de place de formation en alternance pour la rentrée.

«Echec». A l’origine, les Hauptschule étaient le pilier du secondaire en Allemagne. Seuls quelques élèves passaient par les prestigieux lycées (Gymnasium), conduisant au bac (40 % d’une classe d’âge obtient ce diplôme). Aujourd’hui, la moitié des élèves atterrissent en Realschule, de niveau intermédiaire et pouvant aussi déboucher sur un bac.

Les moins chanceux échouent sur les bancs des Hauptschule.

«Vous retrouvez là les 10 % d’une classe d’âge en échec scolaire depuis le primaire, et avec eux une concentration de problèmes en tout genre : sociaux, cognitifs… Ce genre d’école ne peut par définition s’en sortir qu’avec de très bonnes compétences, d’excellents professeurs et davantage de moyens que les lycées. C’est rarement le cas», déplore Siegfried Arnz, chargé du dossier des ­Hauptschule au sein de la municipalité de Berlin. ­

Arnz sait de quoi il parle : il a pendant dix ans dirigé l’une des rares Hauptschule de Berlin à être citées en exemple dans la capitale pour son ambiance de travail et son absence de violences. Sans que cela augmente pour autant les chances de débouchés des élèves.

«A Berlin, où le marché du travail est très tendu, les entreprises préfèrent former des jeunes issus des Realschule et même des lycées plutôt que ceux qui viennent des Hauptschule, regrette le pédagogue.

Dans les Länder du sud et de l’ouest du pays, où la situation économique est meil­leure, c’est un peu différent : les entreprises se rendent compte qu’elles ont davantage intérêt à former un élève peut-être médiocre mais qui restera dans l’entreprise, plutôt qu’un lycéen qui se lancera ensuite dans des études supérieures. A condition que ces élèves respectent les règles élémentaires de discipline et de ponctualité.» Ce qui est loin d’être acquis dans les Hauptschule des grandes villes.

Petra Eggebrecht semble parfois découragée. Au sein de l’école Rütli, elle gère avec sa collègue Steffie Kraemer-Evertz une classe de huit élèves en grande difficulté, âgés de 14 à 17 ans. Les deux enseignantes sont assistées de deux travailleurs ­sociaux. Quatre adultes pour huit jeunes… Ce n’est pas trop. «Avec eux, il faut tout reprendre de zéro : maîtrise de l’allemand, écriture, lecture, mathématiques, comportement… précise Steffie Kraemer-Evertz. L’objectif est de leur permettre de réintégrer à la rentrée une classe normale dans l’école. Avec le groupe qu’on a cette année, je suis sceptique. Je ne sais pas qui va y parvenir. Le niveau est très très faible, et les problèmes de comportement considérables. Ici, c’est un peu comme dans une famille. Noyés dans une classe, j’ai peur que ces jeunes ne s’en sortent pas…»

Ce jour-là, en début d’après-midi, Hussein, Marcel et Aleczander sont encore là. Deux filles qui perturbaient la classe ont été renvoyées chez elles. Difficile d’ignorer la présence de Hussein, 16 ans, qui dessine dans un coin. Ses réactions semblent imprévisibles. Le garçon parle fort et prend la parole à tort et à travers. «Moi, j’ai commencé à sécher l’école en CP», fanfaronne-t-il. Avant de regretter que ses parents ne viennent jamais aux entretiens prévus avec les enseignants . «De toute façon, ils ne savent même pas dans quelle école je vais !»

Bien souvent, ce sont les professeurs qui se rendent dans les familles pour nouer le contact. Marcel n’ouvre pas la bouche, perdu dans la lecture d’un roman d’action. Il est l’un des rares Allemands de l’école et arbore un profil de bouc émissaire. Aleczander s’agite à la cuisine : il a préparé pour le déjeuner une spécialité d’ex-Yougoslavie.

Individuellement, les jeunes sont attachants. «Le problème, c’est l’absence d’adultes de référence offrant un modèle positif, insiste Steffie Kraemer-Evertz. Les parents ne travaillent pas. Certains n’ont de toute façon pas le droit de travailler, du fait de leur statut en Allemagne. Ils ont fui des régions en crise, ne sont pas expulsables, mais on ne leur accorde pas pour autant de permis de séjour ! Enfants et parents n’ont aucune perspective. Nous avons des élèves qui sont les seuls de leur famille à se lever le matin.»

«Aucun avenir». Dans ces conditions, pourquoi maintenir les Hauptschule ? Enseignants et pédagogues réclament l’instauration du secondaire à une, au pire à deux vitesses. Dans ce type de système, «les meilleurs aident les plus faibles et servent d’exemple. Les jeunes des milieux défavorisés se rendent compte que, en travaillant, ils peuvent s’en sortir», plaide Steffie Kraemer-Evertz.

«Les Hauptschule n’ont aucun avenir, parce que les parents engagés refusent ce type de scolarité», insiste Ernst Rösner, chercheur à l’Institut de recherche scolaire de Dortmund.

Seuls 10 % des parents allemands sont prêts à envoyer leur enfant dans ces établissements. 80 % des élèves des 5 000 Hauptschule sont d’origine étrangère. A ce jour, seuls le Land de Schleswig-Holstein et la ville de Hambourg ont décidé leur prochaine suppression au profit d’une scolarité à deux vitesses.


Je rejoindrai donc Véronique qui rappelait dans son dernier commentaire que les sytèmes diffèrent d'un Land à l'autre, tout comme les disparités...